07 December 2011

« Les Missions franciscaines hier et aujourd’hui ».

Frère Damien Isabell, ofm

Novembre 18, 2011 restera un jalon inoubliable pour le franciscanisme francophone en particulier et pour la famille franciscaine en général.  Ce jour-là a été inauguré « L’Ecole Franciscaine de Paris »  Elle « a pour but de susciter, orienter, promouvoir les études, les recherches et enseignements dans les divers domaines de la culture pour faire connaître la pensée franciscaine, ses sources, ses expressions et son influence à travers l’ « histoire jusqu’à aujourd’hui.  Elle offre un cursus de formation préparant à un certificat d’Études Franciscaines (niveau Master 2). »


Les responsables ont organisé pour l’occasion un colloque de deux jours sur le sujet « Les Missions franciscaines hier et aujourd’hui ».  Un frère de notre Scolasticat, Damien Isabell,  a été invité à donner une conférence sur « Un regard sur l’évolution de la mission durant les 50 dernières années » un conférence qui sera publiée dans les actes du colloque, mais que nous voulons résumer ici :

Un regard sur l’évolution de la mission franciscaine durant les 50 dernières années »

Dans la première partie de la conférence, le conférencier étudiera la situation de « mission » avant, pendant et après le Concile Vatican II.  Puis il fera un survol des activités missionnaires de la famille franciscaine, et il conclura avec une réflexion sur le statut de la « mission » franciscaine aujourd’hui.

1. Un monde en tension

A. La tension avant le Concile Vatican II :  Le Concile Vatican II a été convoqué peu après que des pays africains ont gagné leur indépendance des colons.  En fait les années ’60 furent, même en Europe et Amérique, chargés de bouleversements.  Ici et là les missionnaires n’étaient plus les bienvenus et l’autorité même de l’Eglise était mise en question.  Même le mot « mission » a été revu et on  a découvert que la signification récente, c'est-à-dire depuis le 16e siècle, était trop limité dans le monde moderne.

L’Église en tension :  Au début du 20e siècle, les papes ont déjà tâtonné de décrire une nouvelle approche à la mission.  En France, Godin et Daniel ont lancé une bombe littéraire en 1943 dans leur livre France, pays de mission ? En plus l’Eglise avait plusieurs théologies de la « mission », sotériologique (salut des âme), ecclésiocentrique (plantation de l’Eglise), sacramentaliste et eschatologique (Congar).  De côté protestant, Karl Barth a réinterprété le mot « mission » tel qu’il avait été compris jusqu’à là en affirmant que la mission  de Dieu trinitaire et pas des hommes.  Nous croyants participons dans la mission de Dieu, et les catholique à ajouter la mission de l’Eglise est liée à la mission de Dieu.

B. Tensions pendant le Concile Vatican II.  Les évêques du Concile sentaient le besoin d’une définition plus large de la mission car ils avaient compris qu’on ne peut plus la comprendre dans un sens territorial.  Si la France est un pays de mission, quels sont les autres pays ?  Pendant le Concile les évêques, en collaboration avec des observateurs et des periti , ont produit des documents qui obligeaient un changement.  L’origine de la mission est dans la Trinité (Ad gentes), toute l’Église est missionnaire (Lumen gentium), le dialogue est une nouvelle manière de faire la mission (Nostra aetate), l’action salvifique de Dieu rejoint toutes les personne d’une façon inconnue par nous (Gaudium et spes), plus de prosélytisme et maintenant le plus grand respect de la conscience de tous (Dignitatis humane), renverser la division des Églises qui scandaleuse dans le monde (Unitatis redintegratio), effectuer une « rénovation adaptée » de la vie religieuse. Toute cette activité aura son impact sur l’identité franciscaine.  Heureusement, même avant le concile il y avait un réveil des études des sources franciscaines alors les frères n’ont pas affronté les défis du concile avec les mains vides.

C.     Tensions après le Concile

L’identité franciscaine actuelle est fortement marquée par les documents Evangelii nuntiandi  et Redemptoris missio.  Nous parlons de « tension » car depuis le Concile, l’Ordre souffre d’une crise d’identité.  Cependant on peut, avec certaines auteurs, poser la question « faut-il finir avec l’identité ? » car « gagner en extension pour un concept  [comme « mission » «identité » ], c’est toujours perdre en compréhension » (Catherine Halpern).  Il y avait aussi l’inconvenient d’étendre tellement la notion de « mission » de la sorte que tout est mission, et puis rien n’est mission (Amaladoss).

Depuis 1965 jusqu’à 2009, l’Ordre des Frères Mineurs « patauge » sur la question de « mission » qu’il identifie avec sa propre vie.  Les savants franciscains et les chapitres on produit innumérables documents qui formulent clairement les priorités franciscaines (évangile, vie de foi, fraternité, pauvreté et minorité), pourtant Matura observe qu’ « à la découverte théologique de notre identité n’a pas  correspondu le déclic…une réforme…le groupe n’a cessé de diminuer, pour les moins dans le monde occidental…le vieillissement…la raréfaction des entrées, les sortes trop nombreux, la fermeture des maisons , la disparition des province, entraînent la perte de visibilité et l’affaiblissement ».  Cet état d’affaires aura son impact sur la « mission ».

Pour leur part les ministres ont continué a travailler sur a)  la définition de la vie missionnaire franciscaine, et b) les structures renouvelées pour pourront incarner cette vision.  Depuis le généralat de Giacomo Bibi se plaignait de la trop forte décentralisation de l’Ordre qui empêche au ministre général d’animer les frères et de « coordonner des initiatives et projets qui dépassent la province ».  On sent dans les documents de l’ordre des descriptions des attitudes qui empêchent la mission : individualisme, provincialisme, racisme, colonialisme, manque d’imagination et mondanité, pour en citer quelques-unes.

L’urgence de la mission a été ressenti non seulement à cause de la chute des vocations en Europe et Amérique, mais aussi parce que « la tierce Eglise est là », selon le titre du livre du capucin Walbert Bühlmann.  Le nord a la puissance économique, le sud a la puissance humaine et spirituelle.  Certains frères dans l’Ordre ont été troublés aussi par la publication de « L’instruction sur certains aspects de la théologie de libération » et le départ de Leonardo Boff.

II. Réussites franciscaines

Malgré les tensions théoriques et sociologiques, les trois ministres généraux de l’Ordre des Frères Mineurs ont beaucoup travaillé efficacement.

A. Ordre des Frères Mineurs.  Une grande réussite fut le « Projet Afrique »  proclamé en 1982 qui offrait aux frères une nouvelle manière de faire la mission : ensemble comme frères, vie pauvres et fraternelle comme témoignage, offre notre charisme à l’Église locale, en fraternités interculturelles et inter provinciales , demeurer dans les autres pays comme « visiteurs » et pas comme patrons, se laisser évangéliser avant d’évangéliser, former les Africains pour être les missionnaires de leurs propres pays, contribuer à l’Ordre en Europe et Amérique.

 

Ensuite, l’Ordre a lancé un grand nombre de « projets », tous inspirés par les principes du « Projet Afrique » : Projet Thailand, Projet Myanmar, Projet Maroc, Projet Russie-Kazakstan et Sibérie, Prjet Chine, Projet Ukraine, Projet Istanbul, Projet Bruxelles, Projet Congo Brazza, Projet Amazon.  Vu le nombre d’initiatives, on comprend les soucis du ministre général qui cherchent des frères pour continuer les projets.  La Chine est toujours un pays à part, et l’Ordre y a déjà une présence humble mais dynamique.  Outre une léprosarie, les frères chinois Avait 30 frères profès solennels dont 25 prêtres, 4 novices et 12 postulants .

B. Ordre des Frères Mineurs Conventuels.  Exclus de la « mission » des pays espagnols et portugais, les Conventuels ont pris d’autres options en Europe oriental et Turquie.  Le 20e siècle était pour eux une période d’expansion courageuses :

1920-1930 :  Asie, Afrique (Chine, Zambie)

1940-1960 : Amérique Latine : Brésil, Costa Rica, Honduras…

1970-2000 : Amérique Latine : Colombie, Mexique, Venezuela…

En plus, ils ont implanté l’Ordre en Narbonne et revivifié l’Ordre dans les pays qui avaient été sujets au Communisme.  Et au niveau intellectuelle, ils ont organisés deux congrès solides sur des sujets brûlants : 1)  en Cochin, Inde sur « La formation des frères franciscains conventuels pour la mission et pour l’interculturalité au début du troisième millénaire » et 2) à Nairobi, sur le th !me « Intercultural Order ?  Forming for Sharing and Solidarity ».

B. Ordre des Frères Mineurs Capucins.  Pendant la période des ministres généraux du 20e siècle, les capucins ont pu identifier des valeurs essentielles de leur vie et entreprendre des activités missionnaires significatives.  Le secrétaire des missions, Helmut Rakowski, a fait une important contribution à la réflexion missionnaire dans son article « A Mission for Money.  An Interpretation of the Prohibition of Money y St Francis of Assisi seen against the Economic-social Background of His Time ».  Il a pose des questions: “Comment financer notre présence croissant en dehors d’Europe du nor et Amérique du Nord?”  « Quelles sorte de présence cherchent nos sœurs et frères dans ces endroits et pourrions nous les financer dans le futur ? » « Comment créer des nouvelle structures de solidarité qui n’apportent pas de dépendance et en même temps n’exigeront un excessif niveau de centralisation financière au sein de l’Ordre ? ».  Ils concrétisent leur engagement dans le service itinérant de deux frères qui aident les frères locaux à organiser leurs finances et pour promouvoir une économie fraternelle.

L’actuel Ministre Générl, Mauro Jöhri a écrit une lettre circulaire célébrant l’expansion de l’Ordre en Asie, Afrique et Amérique Latine.  Il posait la question de l’implantation responsable de l’Ordre, de la solidarité entre les frères du monde entier, et « notre présence dans les territoires où l’action apostolique est illégal et confrontée à de nouveaux défis… »

4. Quelques Activités interobédientelles : OFM, OFM Conv, OFM Cap, (TOR)

a)  Franciscans International.

b)  St Bonaventure College, Lusaka, Zambia

c)  Notre Dame des Nations, Bruxelles, pour la formation missionnaire.

d)  La Portiuncola Center, Nairobi.

e)  L’Ecole Franciscaine, Paris

 III.  Remarques de conclusion

Il est indispensable de mentionner l’importance de notre activité missionnaire ensemble avec nos sœurs du Tiers Ordre Régulier et des Clarisses, pour ne pas oublier les franciscains séculiers dans certains pays. Des laïcs sont formés à la mission dans la « Franciscan Mission Service » in Washington, DC.

Michel Amaladoss a bien décrit le fait que la mission n’est plus limitée aux pays pauvres et elle ne s’exprime pas seulement dans l’annonce de la parole ou la plantation de l’Église. L’inculturation, le dialogue interreligieux, la libérations « sont aussi intégrales à la mission ».  Dans cette lumière nous pouvons dire que les Franciscains pendant les 50 dernières années ont été très actifs dans la mission de Dieu.  Peut-être ils n’avaient pas compris explicitement leur mission comme celle d’une « communauté eschatologique, réunie autour du trône de Dieu  pour le louer ». Mais le missionnaire-théologien Lesslie Newbigin a aussi défini « la mission est la doxologie mise en acte.  Voici son secret le plus profond. Son but est la glorification de Dieu ».  Peut-être cette vision n’est pas encore acceptée ni assimilée mais c’est elle qui rend la mission « franciscaine » car Dieu est glorifié lorsque toutes les personnes de l’univers puissent aimer avec Lui (condiligentes).

                        

 

 

 





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