Chers Frères et Sœurs,
Que le Seigneur vous donne sa paix !
1. Introduction
C’est Noël, « le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1, 14). Dieu s’invite dans nos cœurs et nous invite dans son cœur. Mais il nous laisse libre dans cette double invitation: « Voici que je me tiens à la porte et je frappe: si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je souperai avec lui et lui avec moi » (Ap 3, 20). Qui peut ne pas ouvrir sa porte quand il sait que Celui qui frappe vient lui donner plus que ce qu’il a toujours cherché ? Qui peut ne pas être heureux quand il sait que Celui qui est né est la vraie réponse et la solution à tous ses problèmes ? Les anges ne pouvaient se taire. Ils ont entonné le gloria pour cette merveille (Lc 2, 13-14) ; et nous, comme « Porteurs du don de l’Évangile », sommes appelés à l’annoncer à toute l’humanité en paroles et surtout en actes.
2. L’Afrique sous les douleurs de l’enfantement
L’Afrique est sous les douleurs de l’enfantement, il ne faut pas qu’elle fasse une fausse couche, mais qu’elle enfante une nouvelle Afrique où il fera beau vivre. Il faut que la naissance du Messie entraine la renaissance de l’Afrique. Pour cette renaissance il est nécessaire que nous-mêmes africains prenions en main et avec courage le destin de notre propre continent qui saigne. En effet, le sang des fils et filles d’Afrique continue à couler au profit des puissances de ce monde qui veulent bafouer l’image sacrée de Dieu dans l’homme pour des intérêts égoïstes. L’Est de la République Démocratique du Congo, le Soudan, l’Égypte, la Tunisie, la Lybie, le Nigeria, le Mali, la Côte d’Ivoire etc. en sont des témoins.
Certaines régions d’Afrique continuent à devenir le théâtre des violences qui s’enchaînent dans un système d’engrenage conçu et entretenu volontairement par les puissants de ce monde au détriment des pauvres sans défenses qui meurent dans la douleur du silence; pourtant pour eux aussi Jésus est né. Cette année encore, certains enfants devenus fatalement orphelins ne pourront plus dire à leurs parents: « Bonne fête papa ! Bonne fête maman !», pourtant Jésus est né aussi pour eux. Il y a tant de victimes traumatisées par des violences, privées de la joie de Noël et pour qui aucun son de cloche de Noël ne se fait plus sentir. C’est au milieu de ces nouveaux aréopages que le Christ nous attend, car il y est crucifié de nouveau. Il appartient à nous tous d’êtres les parents, les amis, les frères et sœurs de ces pauvres et être pour eux des porteurs de joie et de la paix du Christ. Nous portons souvent avec fierté la croix du Christ à nos cous, il nous faut à présent porter le coût de la croix du Christ à nos cous et dans tous les coups de la sequella Christi. Que chacun cherche comment se priver de son avoir, de son être, de son temps, de ses honneurs… pour donner un peu de joie à ceux qui sont à coté de lui et qui gisent dans la tristesse ou qui pleurent, pour que les cloches de Noël sonnent dans leurs cœurs et découvrent aussi la joie de Noël et la bonté de l’Emmanuel. Pour cela, que chaque frère, chaque sœur soit bienfaiteur, bienfaitrice de la paix. Que ceux qui peuvent jouer des médiations pour réconcilier les peuples, les parents, les frères et les sœurs, les amis… n’hésitent en aucun moment de le faire et qu’il ne ratent pas les opportunités qui s’offrent à ce sujet, et cela en commençant par nos propres Fraternités, nos propres familles.
3. Famille africaine à l’image de la Sainte Famille
Dieu a voulu naitre dans une famille humaine pour honorer et sacraliser la famille. L’ Église d’Afrique se veut une église-famille à l’image de la Sainte Famille de Nazareth. Chaque fois que la famille est menacée c’est la Sainte Famille qui en ressent la première les coups. A l’heure actuelle, la famille composée d’un homme, d’une femme et des enfants est menacée par des idéologies négatives. Il nous faut ouvrir l’œil et le bon. Il nous faut conserver notre identité africaine et nos valeurs africaines. Ne soyons pas distraits, regardons bien les signes des temps et interprétons-les à la lumière de l’Évangile (cf. GS 4). Dans ce système de mondialisation où nous nous retrouvons, des idéologies fastes et néfastes traversent frontières, mers et océans et arrivent petit à petit en Afrique par la force et la puissance de la communication mondialisée (Internet et Télévision…). Le Ministre Général dit : « Nous devons réserver une attention particulière au monde des communications sociales, un domaine dans lequel s’entrelacent tant de vies, tant d’interrogations et de doutes ». Ainsi, j’en appelle à tous les frères et sœurs d’avoir le sens critique et un bon jugement face aux medias, à ne pas être extincteurs de la foi catholique mais des défenseurs de cette foi en paroles et surtout en actes.
En ce moment où l’Église a besoin d’un nouvel élan missionnaire, l’Église d’Afrique en a encore besoin d’avantage. Dans cette perspective, je souhaite que nous puissions armer fortement nos frères et sœurs africains des connaissances et valeurs culturelles africaines, afin que la tradition africaine et le message chrétien inculturé résistent à toutes influences négatives étrangères et que soient sauvegardées les valeurs africaines où un homme n’épouse pas un homme et où une femme et n’épouse pas une femme. Pour y arriver il appartient à chaque chrétien de suivre fidèlement l’enseignement de l’Eglise, de discerner et ne suivre que les pasteurs du Christ qui transmettent l’enseignement authentique reçu des Apôtres ; car aujourd’hui tant de pasteurs, tant d’hommes d’Église utilisent le Saint Évangile, mais prêchent un autre évangile que celui du Christ. En effet, «Le sécularisme, l’indifférence et le relativisme ont envahi totalement la vie de tant de baptisés, de prêtres et de consacrés, au point que ces attitudes ne sont plus seulement une menace extérieure mais aussi une confrontation qui nous vient de l’intérieur »[1]. L’Apôtre Paul nous appelle à la vigilance: « Soyez sobres, veillez; votre adversaire, le diable, comme un lion rugissant, rode autour de vous, cherchant qui dévorer. 9 Résistez-lui, fermes dans la foi » (1 P 5, 8-9).
4. Quête de connaissances et de la science qui libèrent
A l’heure actuelle, de nombreux jeunes et enfants n’ont pas la possibilité d’étudier, faute de moyens. Noël, c’est une fête de partage. Selon moi, un des plus grands dons qu’on peut faire à une personne humaine c’est lui donner la possibilité de se réaliser en tant que personne humaine créée à l’image et à la ressemblance de Dieu (Gn. 1, 26-27). Tant de maux ravagent l’Afrique par ignorance ou par mauvaise connaissance de ce qui doit être bien connu. Le cri d’Osée se fait entendre de plus belle aujourd’hui : « Mon peuple meurt faute de connaissance » (Osée 4, 6). Voilà pourquoi j’en appelle aux hommes et femmes de bonne volonté de faire des dons de Noël en apportant une assistance matérielle et spirituelle aux enfants qui ne peuvent pas aller à l’école suite à la pauvreté de leurs parents. Faisons-le par amour du Christ qui dit : « Chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait » (Mt 25, 40).
Je souhaite aussi que les Provinciaux, Custodes et Présidents des Fondations favorisent davantage la formation des consacrés (religieux et religieuses) et même des laïcs dans différents domaines d’études supérieures, afin de faire face au monde moderne qui nous dépasse de plus en plus et qui a besoin d’être évangélisé. Par ailleurs, que ceux qui bénéficient d’une telle formation supérieure pensent à « restituer » (PDE) en retournant à la base pour partager humblement et charitablement leurs acquisitions avec les autres. L’inspiration liée à la transpiration, le savoir lié à la pratique sont là les pistes incontournables pour le progrès de nos Entités et de notre chère Afrique.
5. Missionnaires inter gentes et ad gentes
Chaque Noël doit être une nouvelle Noël qui apporte une nouveauté dans nos vies. Je souhaite que cette Noël fasse de nous des vrais porteurs du Don de l’Évangile dans les milieux où nous exerçons notre mission évangélisatrice inter gentes et ad gentes. A ce sujet, je félicite et encourage tous ces nouveaux missionnaires africains qui ont compris que l’heure est venue de répondre à l’appel de Paul VI : « Africains soyez missionnaires de vous-mêmes» et l’appelle du Chapitre Général d’Assise 2009 pour « restituer le don de l’Évangile » (PDE n°10) en se lançant ainsi dans la Missio ad gentes en Afrique et dans le Monde. Que la grâce de Noël multiplie encore en eux l’ardeur missionnaire, pour qu’ils soient forts dans les épreuves et toujours heureux de souffrir pour l’annonce de l’Évangile.
6. Dialogue avec l’Islam en Afrique
L’Afrique vit un moment particulier de la croissance de l’Islam, c’est ainsi que nous avons eu une rencontre continentale à Djiri au Congo Brazza en juin 2012 où nous avons réfléchi sur ce que doit être notre attitude en tant que franciscains dans le dialogue avec l’Islam. Et en février 2013 une autre rencontre du même type aura lieu à Nairobi au Kenya. Le souhait est que chaque frère vive de sorte que ceux qui nous voient vivre puissent dire qu’il est impossible de s’imaginer que Dieu n’existe pas ou que notre foi chrétienne et catholique en particulier est erronée. C’est ainsi que nous pourrons bâtir une Eglise d’Afrique où ceux qui nous verront vivre ne se préoccuperont pas à se dire : « Voyez comme ils sont organisés », mais plutôt : « voyez comme ils s’aiment, c’est pourquoi ils sont organisés ».
Conclusion
Pour faire face à toutes ces situations, chaque chrétien est appelé à prendre une position claire pour la défense de la foi, car si « tu es tiède et que tu n'es ni froid ni chaud je vais te vomir de ma bouche » dit le Seigneur (Ap, 3, 16). Que chacun puisse prendre à cœur l’invitation du Pape Benoit XVI (cfr Porta Fidei) pour promouvoir la foi par des réflexions, des prières et par une vie vécue en bon catholique, car la « foi sans les œuvres est une foi morte » (Jc 2, 17).
Bonne fête de Noël à tous
Bonne et heureuse année 2013
Fait à Kolwezi, le 22/12/2012
Fr. Marcel Tshikez, ofm
Secrétaire(Délégué) de la Conférence Franciscaine Africaine
pour les Missions et l’Evangélisation.
[1] José Rodriguez Carballo, Message de Noël 2012
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